Forum stratégique Walter

24 novembre 2025

L’IA possède un énorme potentiel pour accroître la productivité, stimuler l’innovation et optimiser l’efficacité, en plus de faire miroiter des possibilités passionnantes pour les entreprises et organisations. Mais elle pose également de grands défis aux personnes dirigeantes et suscite de nombreuses questions.

Le Forum stratégique Walter, organisé conjointement par l’École des dirigeantes et dirigeants HEC Montréal et le Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers de HEC Montréal, le 2 octobre 2025, a réuni chefs d’entreprise et spécialistes en IA afin de réfléchir à la manière dont les organisations, investisseuses et investisseurs devraient aborder les enjeux qui y sont liés. « Nous sommes ici pour examiner en détail les domaines dans lesquels les gens investissent dans l’IA », a annoncé le modérateur Craig Betts, fondateur et directeur de Solace, une compagnie spécialisée dans les technologies de diffusion en continu.

Ajay Agrawal, économiste, professeur spécialisé en économie de l’IA, fondateur du Creative Destruction Lab et coauteur des ouvrages Prediction Machines et Power and Prediction, a résumé la situation lors de son discours d’ouverture : « Ce n’est pas comparable à l’arrivée d’Internet ou des technologies mobiles. En tant que dirigeants, nous évoluons dans un environnement où personne ne sait ce qu’il se passe. Il n’existe aucun mode d’emploi pour le leadership dans ce contexte. »

Les spécialistes à l’événement s’accordent pour dire qu’il y a une forte impression d’urgence parmi les entreprises et les organisations concernant l’IA. « Personne ne renonce à l’utiliser, comme on l’a vu avec Internet et d’autres technologies, a déclaré Robert G. Ashe, directeur à MSCI et ancien directeur principal à Shopify. Les gens se ruent sur ce domaine à corps perdu. » « Ils ont tous le sentiment qu’un tsunami est imminent », a ajouté Joseph F. Squeri, investisseur, directeur de la technologie et fondateur d’une compagnie de technologie financière. « Tout le monde sait qu’il faut agir, mais personne ne sait quoi faire. »

Voici les expertes et experts que nous avons eu la chance d’entendre lors de cet événement :

  • Pierre Somers, président du conseil d’administration et chef de la direction, Groupe Walter
  • Ajay Agrawal, économiste et professeur spécialisé en économie de l’IA, fondateur du Creative Destruction Lab et coauteur des ouvrages Prediction Machines et Power and Prediction
  • Etienne Lacroix, fondateur et chef de la direction, Vention
  • Hien Le, vice-présidente à la croissance, secteur de la santé, Cercle
  • Isabelle Turcotte, cofondatrice et cheffe de la direction, ALL IN; directrice du marketing et vice-présidente de l’écosystème, Scale AI
  • Robert G. Ashe, directeur, MSCI; ancien directeur principal, Shopify
  • Steve Sarracino, fondateur et associé, Activant
  • Joseph F. Squeri, investisseur, directeur de la technologie et fondateur d’une compagnie de technologie financière
  • Craig Betts, fondateur et directeur, Solace
  • Maxime Fortin, associé fondateur, Squarepoint Capital
  • Isabelle Somers, présidente du conseil d’administration, Gestion Walter Capital; fondatrice, Walter Ventures

Distinguer la prédiction du jugement humain

Le conférencier principal, Ajay Agrawal, a entamé l’événement en clarifiant le rôle de l’IA : « Sa puissance réside uniquement dans la prédiction. Seuls les humains possèdent la capacité de jugement. » Selon lui, c’est une excellente nouvelle pour les entreprises.

« L’IA prend en charge la partie prédictive, nous permettant ainsi de nous concentrer sur le jugement : cela ouvre la voie à de nombreuses nouvelles possibilités d’emplois. Mais concrètement, les entreprises sont confrontées à deux choix. Le premier consiste à “intégrer” l’IA à des problèmes précis sans modifier le reste du flux de travail, comme les banques qui utilisent l’IA pour la détection des fraudes, la lutte contre le blanchiment d’argent et le respect des sanctions. » Il qualifie cela de solutions ponctuelles et estime que les entreprises peuvent s’attendre à une augmentation de 20 % de leurs revenus en 1 ou 2 ans en mettant en œuvre l’IA de cette manière.

« Cependant, le véritable avantage, a poursuivi M. Agrawal, réside dans la refonte complète du flux de travail grâce à l’IA, en reconsidérant l’organisation de l’entreprise. Pendant la Révolution industrielle, de nombreuses usines ont résisté à la transition de la vapeur à l’électricité. Cette dernière n’est devenue réellement rentable que lorsque les propriétaires d’usine ont compris qu’ils devaient repenser et modifier leur structure. Ceux qui ont franchi le pas ont connu une hausse de la productivité allant de 500 à 600 %. »

Il a cité des exemples tels que la refonte du secteur des taxis (avec Uber) ou la réorganisation des soins médicaux grâce à l’IA pour rationaliser les échanges d’informations. « Il s’agit davantage d’une révolution industrielle que d’une simple nouvelle vague technologique. »

Des outils d’IA collaboratifs

S’il y a bien quelqu’un qui s’y connaît en matière de réaménagement d’espaces de travail, c’est Etienne Lacroix, fondateur et chef de la direction de Vention. Cette dernière est à la pointe de l’intégration des outils d’IA dans l’industrie et fournit à des milliers d’entreprises des solutions complètes pour automatiser leurs processus plus rapidement et à moindre coût.

« Nous avons créé un flux de travail global avec toutes les étapes sur une seule plateforme, a-t-il souligné. Les entreprises peuvent concevoir des chaînes d’assemblage et des équipements automatisés, puis les programmer et les déployer dans le même environnement, avec des outils d’analyse, de téléopération et d’assistance à distance pour les machines. L’expérience utilisateur est extrêmement simple, comme avec Apple, où le système et le logiciel sont parfaitement intégrés. »

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Transformer les soins aux patientes et patients

Hien Le, vice-présidente à la croissance, secteur de la santé pour Cercle, a exprimé comment son entreprise spécialisée dans l’IA appliquée à la santé des femmes repensait le processus de traitement de la fertilité. Celle-ci développe des outils d’IA pour prédire le succès des traitements de fécondation in vitro (FIV) en fonction du profil des patientes.

« Grâce à ces outils, nous pouvons évaluer le nombre de tentatives nécessaires et même déterminer quels types d’embryons transférer », a-t-elle évoqué. Cette précision quant aux chances de succès de la FIV permet à l’entreprise de proposer des tarifs personnalisés pour ses services. « Lors des consultations, cela aide également les patientes à mieux comprendre leurs probabilités de réussite. »

Le facteur humain

Hien Le et Etienne Lacroix s’accordent pour dire que le principal défi auquel sont confrontées les entreprises lors de la mise en œuvre de l’IA est le facteur humain, qu’il s’agisse de gagner la confiance de la clientèle ou d’obtenir l’adhésion des personnes dirigeantes pour l’adoption de solutions d’IA.

« Dans le secteur de la santé, les professionnels et le personnel doivent être impliqués dans la réflexion sur les processus de travail  , a déclaré Hien Le. « En matière d’automatisation par l’IA, il est essentiel de convaincre les PDG des avantages à long terme et de les accompagner dans l’implantation d’une structure adaptée à cette transformation », a ajouté Etienne Lacroix. En résumé, l’IA n’est utile aux entreprises que si les êtres humains croient en son potentiel.

Sommes-nous dans une bulle?

Du côté des investisseuses et investisseurs, les panélistes ont débattu pour savoir si nous étions au milieu d’une bulle de l’IA. Les opinions divergeaient parmi les spécialistes : d’un oui catégorique jusqu’à un non ferme, en passant par un peut-être. « Du point de vue des professionnels, nous sommes à un stade très précoce et très prometteur, a déclaré Robert G. Ashe. Mais en ce qui concerne les valorisations, il est difficile de ne pas penser qu’elles sont surévaluées. »

« Je dirais que notre première hypothèse est que tout est correctement valorisé et, à mesure que de nouvelles informations arrivent, nous essaierons de prédire la réaction du marché », a soutenu Maxime Fortin, associé fondateur de Squarepoint Capital.

Dans quoi investir?

Les personnes participantes étaient en désaccord quant à la possibilité d’investir dans les entreprises développant des outils d’IA ou dans celles qui les mettaient en pratique – en bref, dans l’infrastructure de l’IA ou ses applications. Joseph F. Squeri a affirmé que l’investissement dans le développement d’outils d’IA était très prometteur : « Tant de capitaux y sont investis que les jeunes entreprises disposent d’une multitude d’options pour créer la prochaine génération de logiciels qui révolutionneront les processus de production. »

Steve Sarracino, fondateur et associé à Activant, privilégie une approche différente : « Selon nous, il faut investir dans les 2 domaines. » Il s’est toutefois dit impressionné par les compagnies qui, à son avis, réinventent les processus de production, comme les pizzerias qui utilisent de nouvelles applications permettant de prédire le moment où la clientèle commandera des pizzas afin de coordonner cette information avec la levée de la pâte.

Comment choisir le bon investissement?

Les panélistes avaient également des points de vue divergents quant à l’investissement massif dans l’IA ou à la détermination des parties prenantes qui deviendront dominantes dans le secteur. Joseph F. Squeri privilégie l’investissement dans les entreprises où « l’IA peut apporter le plus d’avantages en matière de traitement des données, dans des domaines où le coût du travail humain était auparavant plus élevé ».

Robert G. Ashe n’était pas d’accord : « Choisir tôt les entreprises gagnantes, c’est très important. Le secteur d’Internet repose sur des partenaires très dominants, dont l’un détient 80 à 90 % des parts de marché, et je m’attends à ce que ce soit également le cas pour l’IA à long terme. Il est donc pertinent de sélectionner une entreprise gagnante et de le faire rapidement, car c’est là où se trouveront les meilleurs rendements. »

Les questions du public étaient variées et stimulantes. Un participant s’est interrogé : « L’IA développera-t-elle un jour la capacité de juger, qui est encore réservée aux humains? » Ajay Agrawal s’est montré rassurant dans sa réponse : « Si nous donnons à la machine un but et des paramètres précis pour l’atteindre, elle peut alors apprendre à effectuer des choses que les humains n’ont jamais faites et prendre une décision, mais toujours au service des personnes qui ont défini l’objectif et les paramètres. »

« Nous ne souhaitions pas apporter de réponses définitives, mais plutôt susciter la réflexion et faire émerger de nouvelles idées », a déclaré Isabelle Somers, présidente du conseil d’administration de Gestion Walter Capital et fondatrice de Walter Ventures, dans ses propos de clôture. « J’espère que les participants repartiront avec des questions plus pertinentes que celles avec lesquelles ils sont arrivés. » Et, comme nous l’a rappelé Pierre Somers, président du conseil d’administration et chef de la direction du Groupe Walter : « Nous devons permettre à l’IA d’amplifier notre humanité et non de l’effacer. »

Cet événement exclusif a été coorganisé par l’École des dirigeantes et dirigeants HEC Montréal et le Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers de HEC Montréal.

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